Petites mythologies d’aujourd’hui
par Serge Tisseron.
Serge Tisseron, psychiatre et psychanalyste, est l’auteur de nombreux écrits sur la BD, les images et les secrets.
Dans cet ouvrage publié en 2000, l’auteur aborde les mythologies du quotidien nées de l’apparition des nouveaux objets hi-tech, entrés récemment dans nos vies.
Ce livre très riche et éclairant, découpé en 5 chapitres, est hautement recommandable à tout étudiant en communication et publicité, designer ou photographe.L’auteur recense et commente de nombreuses mythologies de notre quotidien : téléphone portable, distributeur automatique de billets, jeux vidéo, internet,…
Cet ouvrage ne pourra que contribuer à la compréhension des discours, des images et des fantasmes générés par notre société de consommation.
Texte en 4e de couverture
En quelques années, notre environnement a été bouleversé par l’apparition de nouveaux objets : téléphones portables, distributeurs automatiques de billets, appareils photographiques jetables puis numériques, sacs en plastique, écrans d’ordinateurs… Pour les intégrer à notre vie, nous avons dû inventer de nouveaux gestes, et ceux-ci sont la source d’émotions et de fantasmes à travers lesquels nous nous familiarisons peu à peu, le plus souvent à notre insu, avec de nouvelles images de nous-mêmes et des autres. Ces images, et les discours qui les accompagnent, constituent autant de « petites mythologies » auxquelles les objets doivent de pouvoir entrer de plus en plus profondément dans notre univers intime.
Car le monde des nouveaux objets, calqué désormais sur le modèle d’une « vie sans mode d’emploi », nous impose aujourd’hui de les apprivoiser dans un corps à corps qui tient autant du fantasme que de la compétence.
Au sommaire :
– Technologies et sensualités
– Grandir dans un monde d’images
– L’avenir est flou
– Les stratégies publicitaires
– Images et croyances
Extraits des pages 77 à 80
Chapitre V « La télécommande du magnétoscope, un nouveau rapport à l’image ».
L’image comme moyen de transport
« Si nous n’y prenons pas garde, une fracture risque de s’établir entre, d’un côté, des adultes pour qui l’image est signification et, de l’autre, des enfants et des adolescents pour qui elle est une interrelation.
Pour l’éviter, il est essentiel de changer le modèle des images qui est le nôtre.
Il faut cesser de les traiter comme des significations pour les considérer comme des moyens de transport. (…)
Nous pouvons utiliser un moyen de transport, comme le train, la voiture, la bicyclette ou la moto, de cinq façons différentes au moins :
– pour nous rendre plus rapidement d’un point à un autre ;
– pour flâner à notre rythme à travers un paysage qui nous enchante ;
– pour connaître la région que nous traversons (alors nous serons sensible à la forme des habitations ou aux vêtements des autochtones) ;
– pour les fortes sensations qu’il nous procure (se déplacer très vite en moto ou en voiture décapotable provoque des sensations fortes et exaltantes) ;
– ou encore pour le plaisir d’être ensemble (une famille qui réalise chaque week-end une promenade commune en voiture existe probablement de manière plus forte en tant que telle qu’une famille qui ne le fait jamais).
Ces cinq grandes fonctions existent également pour les images (…)
Toutes ces façons d’utiliser les images ont un point commun : elles ont l’images comme véhicule.
Elles nous permettent de comprendre que les images se définissent d’abord par leurs fonctions et que celles-ci ne dépendent pas seulement de leurs contenus, mais aussi du support médiatique par lequel elles transitent. Une image ne constitue pas en effet le même véhicule selon qu’elle occupe un écran vidéo, qu’on la voit au cinéma ou à la télé, ou encore sur le mur d’un musée.
Mais cette comparaison attire également notre attention sur un autre aspect.
On ne peut utiliser un véhicule que si on accepte de monter dedans. »
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